Un terrain de sport sur des surfaces agricoles?

Notre commune, située dans le canton de Vaud, est en train de réviser son plan d’aménagement local et souhaite mettre en zone à bâtir une parcelle non construite pour y réaliser un terrain de sport. Le secteur est actuellement affecté à la zone intermédiaire et se trouve en frange du milieu bâti. Lors de l’enquête publique, il y a eu plusieurs oppositions, au motif que les parcelles en question devraient être classées comme surfaces d’assolement. Comment réagir?

À la rubrique «Vous demandez – Nous répondons», les juristes d’EspaceSuisse répondent à des questions relevant du droit suisse de l’aménagement du territoire. Voici la réponse à la question posée ci-dessus:

Malgré le plan sectoriel fédéral de 1992 (révisé en 2020), qui prévoit un quota de surfaces d’assolement (SDA) à respecter pour chaque canton, ces dernières n’ont fait que diminuer. C’est problématique autant du point de vue de l’approvisionnement de la population en denrées agricoles, que de celui de la protection du paysage et de la nature. Depuis la révision de la LAT en 2012, une prise de conscience a eu lieu. La loi exige désormais expressément que les SDA soient maintenues (art. 15 al. 3 LAT).

Si un canton dispose de réserves de SDA, et pour autant que les conditions générales liées à une nouvelle mise en zone soient remplies (art. 15 LAT), il reste possible de classer des SDA en zone à bâtir, mais seulement si les critères cumulatifs suivants sont remplis: un objectif que le canton estime important ne peut pas être atteint judicieusement sans recourir à ces surfaces, et il peut être assuré que les surfaces sollicitées seront utilisées «de manière optimale» (art. 30 al. 1bis OAT).

Le Tribunal fédéral a eu l’occasion de préciser que l’implantation de 25 villas ne pouvait pas être considérée comme revêtant une importance cantonale (arrêt Develier JU), alors que c’était le cas pour un projet-pilote de géothermie profonde (arrêt Haute-Sorne JU). Le plan directeur cantonal précise quels projets sont considérés d’intérêt cantonal. Un terrain de sport d’intérêt local ne répond probablement pas à cette attente. Quant au critère de l’utilisation optimale, il est sujet à interprétation (voir la référence au guide dans l’encadré à gauche). Le Tribunal fédéral a considéré que la construction de maisons individuelles ne correspondait pas à ce critère (arrêt Develier JU).

Lorsque le quota cantonal n’est plus assuré, il ne pourra pas y avoir d’emprise sur des SDA sans compensation. Si le canton se trouve dans une situation critique en matière de préservation des SDA (ce qui est le cas du canton de Vaud), une vigilance accrue s’impose. Afin de pouvoir autoriser les projets prévus, le canton doit recenser les surfaces répondant aux critères des SDA, non prises en compte à ce jour, et retrouver des SDA, notamment en procédant à des améliorations de sols dégradés. La commune doit établir d’office si l’on se trouve ou pas en présence d’une surface d’assolement (arrêt Chéserex VD).

En l’espèce, votre commune devrait donc étudier si la surface en question semble répondre a priori aux caractéristiques des SDA, et mener des investigations pédologiques afin de vérifier s’il s’agit effectivement d’une SDA. Le cas échéant, son utilisation comme zone à bâtir sans compensation sera compromise.

Source: Inforum 2/2021

14 juin 2024: date du congrès EspaceSuisse

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